Une réflexion qui m'est venue alors que je méditais sur autre-chose...

 

"Je ne veux pas être adulte. J'ai peur d'être adulte. Les adultes sont plus grands que moi, ils savent tout mieux que moi, font mieux que moi. Je suis écrasée par leur monde, leurs conventions. Ce monde de grands si pressés, ayant toujours plein de choses importantes à faire, de problèmes à régler, de soucis qui leur tombent sur la tête. Leur monde n'est pas drôle. Il est si sérieux, si grave. Pleins de responsabilités. Rire y est un luxe dont il ne faut surtout pas abuser si l'on veut rester crédible. Rire...c'est un truc d'enfant.

 

Moi j'ai envie de m'amuser. J'ai envie de courir quand je veux courir, de jouer avec le soleil et l'ombre des nuages, regarder les brins d'herbe et les fourmis. Etre dans la nature, chahuter avec les garçons, chanter, danser, dessiner, imaginer être je ne sais quel grand personnage, rêver d'aventure et de nouveaux pays...

Je ne veux pas être adulte, c'est tout."

 

Mais dans ce bas monde on ne choisit pas toujours...

 

Une image me vient : je suis dans une pièce avec un homme. Il est grand, l'air sévère, habillé comme un adulte : chemise blanche et costard sombre. Je suis en train de jouer lorsqu'il vient brusquement m'interrompre : "allez viens, ça suffit ! Il y a des choses à faire !" Des choses à faire...et ce que j'étais en train de faire, alors, ce n'était rien ? Des choses à faire...mais je n'ai pas envie de les faire. Ça paraît si sérieux, si contraignant, si agaçant même que cet homme s'énerve lorsque je ne comprends pas assez vite. Sans même que j'ai eu le temps d'exprimer mon opposition, il me tire par le bras et me fait m’asseoir à une table faire ces choses si importantes. Ces choses qu'on doit faire car on a décrété que c'était le moment, qu'à tel âge il fallait apprendre telle chose, résoudre tel problème, peu importe si ce n'était pas mon problème, peu importe si ça m'intéressait ou pas, si j'aimais ça ou pas. Mon avis ne compte pas, il est insignifiant. Je me sens nulle : toutes ces choses essentielles à mes yeux, ces passions qui font ce que je suis, sont en fait inutiles. On ne les reconnait pas, ne les considère pas. Ce sont des jeux, des rêves, des foutaises. Le vrai monde n'est pas comme ça.

Alors je perds confiance en moi, je m'oublie, j'oublie qui je suis. J'apprends à me mépriser même, afin de devenir celle qui "fait ce qu'il y a à faire"...

 

Pourtant, je sens qu'il aurait fallu peu de choses pour que j'ai envie de grandir.

 

Une nouvelle image me vient : je suis dans cette même pièce, avec ce même homme mais différent : habillé d'une chemise claire aux couleurs chaudes, détendu, un léger sourire de satisfaction aux lèvres. Il est assis à une table, dans un coin près de la vitre baigné d'un beau rayon de soleil. Il travaille sur son projet, l'air fier, content et si passionné que ma curiosité en est piquée : je me dépêche de le rejoindre, un sourire se dessinant sur mes lèvres comme si son enthousiasme m'avait déjà prise. Je lui demande ce qu'il fait. Alors il m'explique son projet, sa vision, ses idées, toujours avec cette même flemme dans les yeux, cette confiance en lui, en l'avenir et en son travail. Et en l'écoutant, étrangement, je grandis : me voilà une jeune fille absorbée par la discussion, partageant sa vision, curieuse, questionnant, cherchant avec lui des solutions, réfléchissant. J'apprends avec amour.

Puis je suis une jeune femme épanouie, brillante, habillée en femme d'affaire : élégante et chique en tailleur coloré. J'accompagne l'homme dans les plus hauts étages des plus grands buildings. Nous parlons devant des gens importants, animons des réunions où se prennent certainement de grandes décisions. J'assiste l'homme, suis capable de prendre le relais de ses affaires. Je suis considérée, appliquée, entreprenante, promise à continuer une excellente carrière.

Puis, à un moment de retrait, observant l'homme devant tout ce petit monde -son monde-, je pressens que j'ai fait mon temps à ses côtés, que je suis prête à partir : il est l'heure de travailler à mon projet.

Je m'apprête à le lui dire, tout en confiance. Seuls, assis l'un en face de l'autre dans l'une de ces grandes salles de réunion, je lui fais part de ma décision. Il m'écoute attentivement, le regard pensif, fixé sur un point au hasard, sourcils légèrement froncés. Il doit être surpris de mon annonce. Peut-être même est-il un peu déçu, car il nous voyait bien continuer à avancer ensemble : cela fonctionnait si bien.

Mais c'est un homme intelligent, et un homme de cœur : il comprend. Alors son regard s'illumine, un sourire enthousiaste se dessine sur ses lèvres, il me regarde droit dans les yeux et dit :

"Je suis très fier de toi. Tu es prête. Tu as beaucoup appris, beaucoup travaillé, car tu t'es passionnée pour ce que tu faisais. Tu te sais capable, tu as confiance en toi. Alors va-s-y. Va découvrir qui tu es. Va l'exprimer, le développer et le partager. Ce sera unique et magnifique, et j'ai hâte de voir ce qui sortira de tes tripes. Nous resterons toujours connectés d'un manière ou d'une autre, car nous vivons avec la même énergie. Mais lorsque nous nous reverrons, ce sera pour partager et apprécier chacun qui l'on est."

Puis je me vois partir et débuter cette grande aventure, monter un projet, travailler consciencieusement et avec passion, créer des choses nouvelles qui serviront à d'autres...

 

C'est étrange, je ne sais pas pourquoi ces images me sont venues. Mais...ça m'a fait un bien fou. Certainement un petit nettoyage émotionnel à faire !

 

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